[1930-1960] : Entre Europe et Etats-Unis, un néoclassicisme à l’écoute de son temps
2019 - Director : Plasson, Fabien
Choreographer(s) : Lifar, Serge (Ukraine) Tudor, Antony (United Kingdom) Balanchine, George (Russian Federation) Béjart, Maurice (France) Petit, Roland (France)
Suite en blanc
Lifar, Serge (Serge Lifar-Suite en blanc.mp4)
2018 - Director : Picq, Charles
Choreographer(s) : Lifar, Serge (Ukraine)
Pillar of fire
Tudor, Antony (United States)
2018
Choreographer(s) : Tudor, Antony (United Kingdom)
Agon
Balanchine, George (United States)
1993
Choreographer(s) : Balanchine, George (Russian Federation)
Video producer : The Balanchine Trust
Joyaux
Balanchine, George (France)
2018 - Director : Cavassilas, Pierre
Choreographer(s) : Balanchine, George (Russian Federation)
Le mystère Babilée - Le jeune homme et la mort
Petit, Roland (Mystere Babilee-jeune homme et la mort.mp4)
2019
Choreographer(s) : Petit, Roland (France)
La IXème symphonie
Béjart, Maurice (France)
1966
Choreographer(s) : Béjart, Maurice (France)
[1930-1960] : Entre Europe et Etats-Unis, un néoclassicisme à l’écoute de son temps
2019 - Director : Plasson, Fabien
Choreographer(s) : Lifar, Serge (Ukraine) Tudor, Antony (United Kingdom) Balanchine, George (Russian Federation) Béjart, Maurice (France) Petit, Roland (France)
Autor : Céline Roux
Descobrir
« Néoclassique » : le terme commence à être utilisé après la Seconde Guerre mondiale notamment dans la presse française. Ce qui est « néoclassique », c’est avant tout ce qui se passe dans les corps : les deux plans verticaux et horizontaux sont remis en question notamment par le non-respect de l’aplomb et de la verticalité mais aussi par les déhanchements et l’asymétrie. Les œuvres peuvent être narratives, expressives voire abstraites dans un renouvellement musical. La danse néoclassique s’imprègne des contextes dans lesquels elle prend forme. Si les Ballets russes n’ont pas ouvert d’école, ni développé un désir de transmission, les générations à venir vont, quant à elles, transmettre et enseigner les fondements de ces néo-classiques naissants.
(Ce Parcours vidéo vous invite à voyager parmi des œuvres chorégraphiques du début du XIXème. La qualité des vidéos peut varier en fonction de l'ancienneté de l’œuvre.)
Description
Suite en blanc
Serge Lifar / Opéra de Paris
Avec Suite en blanc, Serge Lifar propose un ballet sans livret, un ballet en un acte et huit thèmes.
Dans cette reprise par le Ballet du Rhin, le Pas de cinq donne à voir une technique masculine mise en avant notamment dans les batteries en contrepoint de la soliste.
Dès 1929 et la fin des Ballets russes, Serge Lifar est nommé à l’Opéra de Paris, une invitation à réformer cette institution encore très imprégnée du 19e siècle : élargissement du répertoire, valorisation de la danse masculine, nouvelle grammaire corporelle sont à l’œuvre. Pour lui, la danse, c’est « l’en-dehors, l’équilibre, l’extase, l’élévation… C’est la géométrie contrôlée, ordonnée et appliquée ».
Dans La Cigarette, les petits pas courus sur pointes en parallèle, le jeu des bras, les inclinaisons de bassin, les déplacements sautillés sur pointes sont autant d’éléments renouvelant le vocabulaire et donnant un caractère mutin à la danse.
Pillar of fire
Antony Tudor / American Ballet Theater
Aux Etats-Unis, la danse classique n’a pas de racines profondes et les années 1940 auront un objectif : inventer un classique américain. Au sein de l’American Ballet Theater, Antony Tudor va développer le « psychological ballet » : un ballet narratif soutenu par un fort déploiement dramatique. L’expression prend corps dans la danse, les gestes naturels et une incarnation théâtrale aux accents de modernité.
Dans cette reprise du Colorado Ballet, les mises à genoux successives d’Agar, la jeune fille dont le ballet raconte la vie, ainsi que les mains jointes au ciel en prière de sa sœur exposent la nature dramatique de ce qui se joue sur scène : exposer le puritanisme américain et la pression des forces communautaires sur une jeune fille confrontée aux ressorts des passions qui l’entourent et aux jugements de ses pairs.
Agon
George Balanchine/ NYCB
Agon est exemplaire des principes balanchiniens : La danse est claire et graphique, sans obligation narrative. La danse peut se passer de tout décor ou costume : un tapis, un cyclorama éclairé, un justaucorps et un collant suffisent. C’est la relation musique-danse qui prime.
La danseuse devient verticale, aux jambes longues, au buste plat et au cou allongé. L’aplomb du corps et l’empilement des volumes ne sont plus nécessairement respectés. Les lignes dans l’espace, la vitesse et le déséquilibre sont recherchés. Le pas de deux devient un jeu gravitaire entre les partenaires offrant un renouvellement des lignes et des formes.
C’est en 1933 que le chorégraphe arrive aux Etats-Unis et participe à l’élaboration d’un néoclassique américain. Dès 1934, il fonde la New School of American Ballet puis, en 1948, le New York City Ballet. Le ballet américain peut former et produire ses danseurs, avec comme main de maître, un russe : George Balanchine.
Jewels
George Balanchine/ NYCB
L’interprétation y est souriante et joyeuse offrant un plaisir et une dimension divertissante. Entré au répertoire de l’Opéra de Paris en 2000, Jewels est un ballet en trois parties évoquant des pierres précieuses auxquelles sont associées les grandes « écoles » de la danse classique française, américaine et russe. Dans cet extrait des Rubis, la danse néoclassique flirte avec des traditions américaines empruntées au music-hall et aux comédies musicales de Broadway. Les poignets sont volontiers cassés. Le bassin s’appuie en avant sur la pointe, bascule en arrière ou ondule au son des notes de piano de Stravinski. Les hanches passent de l’en-dehors à l’en-dedans…
Jewels expose ainsi le syncrétisme à l’américaine dont font preuve des chorégraphes comme Georges Balanchine ou Jerome Robbins travaillant tour à tour à la création de ballets, de revues, de comédies musicales et de films.
Le jeune homme et la mort
Roland Petit / Les Ballets des Champs-Elysées
En France, dans l’après guerre, de jeunes chorégraphes se révèlent : Janine Charrat, Roland Petit, Maurice Béjart… Roland Petit, formé notamment auprès de Serge Lifar, va développer un univers hétéroclite. Ici, c’est par l’entremise de Jean Cocteau qu’il crée un ballet existentialiste porté sur scène par Jean Babilée et Nathalie Philippart, rôle repris dans cet extrait par Claire Sombert.
Travaillée en répétition sur de la musique jazz, c’est sur La Passacaille de Bach que le public découvre l’œuvre : le « synchronisme accidentel » musical ajoute de la force à la gestuelle acrobatique. Roland Petit compose pour Jean Babilée une danse faite de sauts et de chutes, de moments d’attente et de regards répétés vers la montre portée au poignet évoquant la perturbation psychologique d’un jeune artiste écartelé entre l’Amour et la Mort.
La Neuvième symphonie
Maurice Béjart / Les Ballets du XXe siècle
Maurice Béjart a développé son œuvre et sa transmission de Paris à Bruxelles, de Bruxelles à Dakar, de Bruxelles à Lausanne.
Quête de thématiques en lien avec son temps. Recherches de vocabulaire au-delà des cultures. Il refuse de définir la danse en des genres, styles ou catégories, mais reste attaché à la danse classique qu’il voit comme une « base de travail » à l’incorporation de tout autre mouvement dansé.
Voyage dans le temps. 1966. Palais des Sports de Paris. La danse est un rituel. Le corps est ancré dans le sol. Les mouvements sont affirmés. La chorégraphie utilise des formes fédératrices collectives : unissons, lignes, farandoles, rondes… et le sol en expose le canevas : autant de formes, de figures, de pointillés dessinant les rites universels, tout en servant de repères aux danseurs.
L’humanité regarde l’humanité fraternelle qui danse ce syncrétisme entre les cultures tant recherché par le chorégraphe.
Com mais profundidade
Les références bibliographiques sur cette période sont très nombreuses. La bibliographie proposée résulte de choix pour permettre aux lecteurs d’approfondir leurs connaissances, d’accéder à des témoignages iconographiques et d’approcher la parole des artistes et des témoins de leur temps.
Sources
Lifar Serge, Le Manifeste du chorégraphe, Paris, Étoile, 1935, extrait repris dans Marcelle Michel et Isabelle Ginot, La Danse au XXème siècle, Paris, Bordas, 1995, p.44.
Maurice Béjart, Lettres à un jeune danseur, Paris, Actes sud, 2001.
Michel Robert, Maurice Béjart, une vie – derniers entretiens, Bruxelles, Editions Luc Pire, 2009.
Petit Roland, Rythme de vie, entretiens avec Jean-Pierre Pastori, coll. Paroles vives, ed. La Bibliothèque Des Arts, 2003.
Ouvrages monographiques
Amberg George, Ballet in America: The Emergence of an American Art, Amberg Press, 2007 (1923).
Christout Marie-Françoise et Lefèvre Brigitte, Serge Lifar à l’Opéra, Editions de la Martinière, 2006.
Dominique Genevois, Mudra, 103 rue Bara. L’école de Maurice Béjart 1970-1988, Bruxelles, Contredanse, 2016.
Mannoni, Gérard, Roland Petit, coll. L'Avant-Scène ballet/danse, ed. L'Avant-Scène théâtre, 1984.
Pastori Jean-Pierre, 2. La danse : Des Ballets russes à l’avant-garde, Paris, découvertes Gallimard, n°332, 1997 (pour l’édition la plus récente).
Poudru Florence, Serge Lifar : la danse pour patrie, Hermann, 2007.
Poudru Florence, Dans le sillage des Ballets russes, 1929-1959, Pantin, CND, 2010.
Suquet Annie, L’éveil des modernités (1870-1945), Pantin, CND, 2012.
Gottlieb Robert, George Balanchine: The Ballet Maker, Ed. Harper Collins, 2004.
Vaill Amanda, Somewhere : The Life of Jerome Robbins, Broadway Books, 2008.
Catalogues d’exposition
Zizi Jeanmaire, Roland Petit - un patrimoine pour la danse, (dir. Alexandre Fiette) (exposition, Genève, Musée Rath), somogy editions, 2007.
Open sources
Dossier « le style néoclassique, une maladie honteuse ? », in Journal de l’ADC, n°39, avril-juin 2006, pp.3-9 / https://archives.adc-geneve.ch/assets/files/journal%20de%20l'adc/JADC39.pdf
Autor
Docteur en Histoire de l’art, Céline Roux est chercheur indépendant. Spécialiste des pratiques performatives du champ chorégraphique français, elle est notamment l’autrice de Danse(s) performative(s) (L’Harmattan, 2007) et de Pratiques performatives / Corps critiques # 1-10 (2007-2016) (L’Harmattan, 2016). Conférencière, formatrice et enseignante, elle intervient dans différents cadres d’enseignement supérieur ainsi que dans la formation des danseurs. Elle collabore aussi aux projets artistiques de danseurs-chorégraphes contemporains que ce soit pour les archives d’artiste, la production de textes critiques et de projets éditoriaux, ou l'accompagnement dramaturgique. Elle a collaboré à plusieurs projets numériques de partage de la culture chorégraphique comme 30ansdanse.fr. Parallèlement à ses activités sur/pour/autour de l’art chorégraphique, elle pratique le hatha yoga en France et en Inde depuis plusieurs années.
Créditos
Sélection des extraits
Céline Roux
Texte
Céline Roux
Production
Maison de la Danse