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Le Sacre et ses révolutions

Le projet du Sacre du printemps s’est imposé à Jean-Claude Gallotta en 2011 comme le second volet du diptyque commencé avec Gainsbourg et Bashung et l’Homme à tête de chou : mêmes danseurs, même lumière sélénienne, mêmes énergies venues directement de la musique.Retour ligne automatique
Ce Sacre est ainsi proposé dans une version chorégraphique rude, sans affèteries, sans brillance décorative, plus que jamais « cérémonie païenne », selon les mots du compositeur. Pas d’anecdote, pas d’intrigue, ni d’« Elue », chacune des interprètes, sur scène, est « éligible », tour à tour, comme pour mieux rétorquer à l’obscur « pouvoir discrétionnaire » des dieux et des pouvoirs. La pièce créée à la MC2 puis présentée au Théâtre de Chaillot il y a trois ans, connaît cette saison (1) une nouvelle ampleur : elle est programmée en mars 2015 lors de la saison d’ouverture de la nouvelle salle de la Philharmonie de Paris où elle sera accompagnée par le grand orchestre du Brussels Philharmonic dirigé par Michel Tabachnik.

En avant-programme, Jean-Claude Gallotta présentera deux nouvelles et courtes pièces : Jonchaies de Iannis Xenakis et Hommage à Angela Davis, sur les Six pièces pour orchestre, op.6 d’Anton Webern. 

Jonchaies

En première partie de programme, j'ai voulu rapprocher Yannis Xenakis d'Igor Stravinsky. Émigrés, « traverseurs » de l'époque, partageant une conception révolutionnaire de la composition, il était tentant, après Stravinsky, de faire se rencontrer Xenakis et la danse contemporaine dont il ne faut pas oublier qu'elle a en partie pris son essor avec la rencontre choc entre Merce Cunningham et la musique expérimentale de John Cage. 

Jonchaies est une œuvre que l'on aime à qualifier de saisissante. La danse ne peut qu'être tentée de la saisir à bras le corps, de s'enchevêtrer dans cette grandiose forêt de joncs soumise à la violence des percussions, des cuivres, de leur puissance, de leurs grands écarts, de s'enrouler à elle, de chercher à se frayer son chemin dans cette musique si impétueuse et si intense.

Jean-Claude Gallotta

Hommage à Angela Davis sur les Six pièces pour orchestre, op.6

Crées en 1913 à Vienne, deux mois avant le Sacre du Printemps à Paris, les Six pièces pour orchestre, op.6 d'Anton Webern, provoquent également cette année-là un énorme scandale artistique. Aujourd'hui, elle est pour moi une pièce qui apprend à écouter, qui apprend à percevoir la richesse que peuvent contenir trois simples notes, peut-être comme la danse contemporaine essaie de faire « entendre » ce que recèle un simple geste. 

Avec ce solo (dansé par Ximena Figueroa), je rends hommage à Angela Davis qui bouscula si fort les ordres établis. Elle est un écho possible à la brèche qu'ouvrit la musique de Webern après la Deuxième guerre mondiale, où l'art et la société, ayant échoué à empêcher la monstruosité des hommes à se développer, « ne pouvant plus être comme avant », se devaient d'entreprendre des révolutions sur tous les fronts.

Jean-Claude Gallotta

Le Sacre du printemps

Chaque chorégraphe porte un Sacre en lui. Celui de Jean-Claude Gallotta vient de loin, du pensionnat où ce vieux professeur de musique lui fait entendre l'œuvre pour la première fois sur un vieux tourne-disque trop sillonné. Les images l'emportent. Des figures séraphiques, des ombres sensuelles, des corps tourmentés, des éveils interdits, des émois inexpliqués, des palpitations troublantes. 

C’est alors qu’il chorégraphiait la dernière séquence de son spectacle précédent, l’Homme à tête de chou d'après l'album de Serge Gainsbourg, que lui sont revenus ces souvenirs. Par quelle voie secrète ? Par la silhouette de Marilou traversant la scène comme l’Élue de Stravinsky, toutes deux mêmement offertes à la mort ? Par la musique de Gainsbourg nourrie, parfois clandestinement, de références classiques ?  Par la vitalité de ses danseurs dont il lui paraissait indispensable de prolonger la flamme? En guise de réponse, le Sacre s’est alors imposé comme le second volet du diptyque commencé avec l'Homme à tête de chou : mêmes danseurs, même lumière sélénienne, mêmes énergies venues directement de la musique. 

Le Sacre, « cérémonie païenne », ne comporte pas d’anecdote, pas d’intrigue. Jean-Claude Gallotta ajoute : pas d’Élue, ou du moins pas d’Élue unique, glorifiée puis sacrifiée. Chaque interprète féminine est « éligible », tour à tour, histoire de rétorquer à « l’obscur pouvoir discrétionnaire » des dieux, des hommes et des pouvoirs.  

Claude-Henri Buffard

Gallotta, Jean-Claude

Après un séjour à New York à la fin des années 70 où il découvre l'univers de la post-modern Dance (Merce Cunningham, Yvonne Rainer, Lucinda Childs, Trisha Brown, Steve Paxton, Stuart Sherman...), Jean-Claude Gallotta fonde à Grenoble – avec Mathilde Altaraz – le Groupe Émile Dubois qui deviendra Centre chorégraphique national en 1984. Installé depuis ses débuts à la Maison de la culture (dont il sera le directeur de 1986 à 1989), il y crée plus de soixante chorégraphies présentées sur tous les continents, dont Ulysse, Mammame, Docteur Labus, Presque Don Quichotte, les Larmes de Marco Polo, 99 duos, Trois générations, Cher Ulysse...


Il a également chorégraphié plusieurs pièces pour le Ballet de l'Opéra de Lyon et pour le Ballet de l'Opéra de Paris. Invité par le metteur en scène Tadashi Suzuki à Shizuoka (Japon), il y a créé et fait travailler une compagnie japonaise de 1997 à 2000. Après l'Homme à tête de chou (à partir de l'album de Serge Gainsbourg dans une version d'Alain Bashung) en 2009, il crée en 2011 Daphnis é Chloé (Théâtre de la Ville) et le Sacre du printemps (Théâtre national de Chaillot) ; fin 2012, il présente Racheter la mort des gestes - Chroniques chorégraphiques 1 au Théâtre de la Ville, puis à la MC2 ; début 2013, la recréation d'Yvan Vaffan cherchant ainsi patiemment à partager avec le public un même récit, celui d'une histoire et d'un avenir artistique communs.

En octobre 2013, il co-signe le spectacle l'Histoire du soldat de Stravinsky et l'Amour sorcier de Manuel de Falla avec le chef d'orchestre Marc Minkowski et le metteur en scène Jacques Osinski. En 14-15, il présente le Sacre et ses révolutions à la Philharmonie de Parie et en juin, crée l'Étranger à partir du roman d'Albert Camus à la MC2 : Grenoble.

Il ouvre la saison 2015-2016 avec My Rock à la MC2 : Grenoble, puis au Théâtre du Rond-Point à Paris.

 

 

Groupe Émile Dubois

À la fin des années soixante-dix, une poignée de jeunes chorégraphes surgit sur la scène française. Jean-Claude Gallotta est de ceux-là. En 1981, Il crée sa compagnie, le Groupe Emile-Dubois avec Mathilde Altaraz, et huit danseurs (quatre garçons, quatre filles), inspiré par la révolution chorégraphique de Merce Cunningham et John Cage à New York. Ces danseurs ne sont pas recrutés sur les seuls critères techniques mais sur leur personnalité, leur différence, leur désir de s’intégrer dans un groupe ; l’un vient du théâtre, un autre de l’architecture, une troisième est médecin.


Le G.E.D. est invité à s’installer comme cellule de création dans les murs de la Maison de la Culture de Grenoble. Une de ses premières pièces, Ulysse (1981), est tout de suite reconnue comme fondatrice de la nouvelle danse française. Le chorégraphe surprend, avec un « ballet blanc » qui ne détruit pas le tissu classique, mais joue avec et l’intègre dans la gestuelle contemporaine.


Dans ces premières années, le G.E.D. contribue à faire naitre l’idée des Centres chorégraphiques nationaux. Celui de Grenoble est un des premiers, il lui est attribué en 1984.

Au début des années 90, le G.E.D. produit des spectacles appelés D.T.M (danse, texte, musique) selon cette idée que la notion de danse doit dépasser la simple question du mouvement des corps et doit intégrer le son, la voix, la parole, le sens.


Au fil du temps, l’équipe de danseurs se renouvelle mais l’importance que le chorégraphe accorde à la qualité des rapports humains entraine chaque interprète à suivre la compagnie sur plusieurs spectacles, à l’exemple de Thierry Verger depuis 1992, de Béatrice Warrand depuis 1995.


Le G.E.D. fait ainsi voyager dans le monde entier un style chorégraphique qui, à partir de la source Cunningham, s’est développé de façon très personnelle avec notamment l’introduction d’un humour gestuel et d’une réflexion permanente sur la singularité du corps de « ceux qui dansent, ceux qui ont dansé, ceux qui aimeraient bien, ceux qui ne danseront peut-être jamais".


Fin 2015, le G.E.D. quitte l’écrin du Centre chorégraphique national et reprend son identité première tout en continuant à travailler à l’intérieur de la MC2 Grenoble. Jean-Claude Gallotta devient également auteur associé du Théâtre du Rond-Point à Paris.


Le G.E.D. a présenté Volver en 2016, a repris My Rock, a créé My Ladies Rock en 2017 et prépare Comme un trio d’après Bonjour Tristesse de Françoise Sagan (automne 2018) ainsi que la recréation de l’Homme à tête de chou (printemps 2019).

Outre les créations de Jean-Claude Gallotta, le G.E.D. gère également la transmission de pièces de répertoire et des actions de sensibilisation auprès de publics scolaires et amateurs.


Le Groupe Émile Dubois / Cie Jean-Claude Gallotta est soutenu par le Ministère de la culture et de la communication en tant que Compagnie à rayonnement national et international. Il est également soutenu par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et le Département de l’Isère.


Source : Groupe Émile Dubois


En savoir plus : www.gallotta-danse.com

Le sacre et ses révolutions

Chorégraphie : Jean-Claude Gallotta

Assistance à la chorégraphie : Mathilde Altaraz

Interprétation : Alexane Albert, Ximena Figueroa, Alexandre Galopin, Ibrahim Guétissi, Georgia Ives, Bruno Maréchal, Bernardita Moya Alcalde, Cécile Renard, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger, Stéphane Vitrano, Béatrice Warrand, Francesca Ziviani

Conseil artistique / Dramaturgie : Claude-Henri Buffard

Musique live : direction musicale Michel Tabachnik musiques Iannis Xenakis, Anton Webern, Igor Stravinsky orchestre Brussels Philharmonic

Lumières : Dominique Zape assisté de Pierre Escande

Costumes : Jacques Schiotto et Marion Mercier assistée d’Anne Jonathan

Décors : Jeanne Dard

Production / Coproduction de l'œuvre chorégraphique : Coproduction Centre chorégraphique national de Grenoble et Philharmonie de Paris

Durée : 6'34

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