La danse classique occidentale entre dans la modernité du 20e siècle : Les Ballets russes et les Ballets suédois
2019
Chorégraphe(s) : Fokine, Michel (Russian Federation) Nijinsky, Vaslav (Russian Federation) Massine, Léonide (Russian Federation) Börlin, Jean (Sweden)
Yvette Chauviré
Fokine, Michel (France)
2018 - Réalisateur-rice : Delouche, Dominique
Chorégraphe(s) : Fokine, Michel (Russian Federation)
Producteur vidéo : Lieurac productions, La Sept, Ina
Le spectre de la rose
Fokine, Michel (France)
2018
Chorégraphe(s) : Fokine, Michel (Russian Federation)
L'après-midi d'un faune
Nijinsky, Vaslav (France)
2009 - Réalisateur-rice : Roussillon, François
Chorégraphe(s) : Nijinsky, Vaslav (Russian Federation)
Producteur vidéo : François Roussillon et associés
Le Sacre du Printemps
Nijinsky, Vaslav (France)
2009
Chorégraphe(s) : Nijinsky, Vaslav (Russian Federation)
Parade
Massine, Léonide (France)
2008 - Réalisateur-rice : Picq, Charles
Chorégraphe(s) : Massine, Léonide (Russian Federation)
Producteur vidéo : Maison de la Danse
Vidéo intégrale disponible à la Maison de la danse de Lyon
Relâche
Börlin, Jean (France)
2014 - Réalisateur-rice : Riolon, Luc
Chorégraphe(s) : Börlin, Jean (Sweden) Jacobsson, Petter (Sweden) Wavelet, Christophe (France)
Producteur vidéo : 24 images
La danse classique occidentale entre dans la modernité du 20e siècle : Les Ballets russes et les Ballets suédois
2019
Chorégraphe(s) : Fokine, Michel (Russian Federation) Nijinsky, Vaslav (Russian Federation) Massine, Léonide (Russian Federation) Börlin, Jean (Sweden)
Auteur : Céline Roux
Découvrir
En 1909, en Russie, naissent les Ballets russes sous l’impulsion de Serge de Diaghilev, un producteur qui a un rêve : exporter la culture russe dans le monde et créer un art développant un lien étroit entre musique, dessin décoratif et danse. Les thèmes des ballets sont hétéroclites et il compose des programmes variés pour des soirées de danse où se côtoient tradition et innovations. Travaillant temporairement entre Londres, Paris, Monte Carlo et Rome, la troupe ne cessera de faire des tournées à travers le monde. De 1909 à 1929, entouré d’artistes d’exception, adorant et recherchant des projets d’avant-garde, Diaghilev fait entrer la danse classique dans une nouvelle ère : celle du 20e siècle !
(Ce Parcours vidéo vous invite à voyager parmi des œuvres chorégraphiques du début du XIXème. La qualité des vidéos peut varier en fonction de l'ancienneté de l’œuvre.)
Description
La Mort du cygne - Michel Fokine / Les Ballets Russes
En 1907, Michel Fokine chorégraphie La Mort du cygne sur le 13e mouvement du Carnaval des animaux de Camille Saint-Saëns. Ce ballet, de quelques minutes, est écrit pour une interprète d’exception : Anna Pavlova. Elle incarne l’élégance et la peur de l’oiseau blessé qui ne cesse de vouloir s’envoler et qui retombe indéfiniment. Dans l’extrait présenté ici, Yvette Chauviré transmet son interprétation de cette danse à Dominique Khalfouni.
Le vocabulaire dansé est réduit. La répétition sert comme motif de composition avec les menés sur pointes et les ondulations des bras. Fokine laissa une grande liberté à Anna Pavlova qui développa l’interprétation du rôle. Les chutes vers le sol et les cassures du dos et de la nuque de La Pavlova sont absentes ici de l’interprétation d’Yvette Chauviré qui préfère les multiples inclinaisons et extensions du buste ainsi que quelques pliés profonds sur pointes pour incarner le sujet. Ainsi, la ballerine moderne est née !
Le Spectre de la rose - Michel Fokine / Les Ballets russes
Créé en 1911, Le Spectre de la Rose est inspiré d’un poème de Théophile Gauthier. En faveur d’un art expressif, Michel Fokine invente un langage corporel en lien avec chaque sujet traité. Ici, le thème est simple et romantique : de retour du bal, une jeune fille s’endort une rose à la main qui, dans son rêve, se personnifie. Mais le défi est de taille pour Fokine : trouver une gestuelle pour cet homme-fleur !
Dans cet extrait, version de Pierre Lacotte pour l’Opéra de Paris, Mathias Heymann en homme-fleur nous expose les caractéristiques gestuelles du rôle. Le caractère masculin est développé dans le bas du corps avec des éléments techniques époustouflants : grands sauts, travail de jambes et de batteries, tours interminables et grandes prises d’espace. L’évanescence de la rose est incarnée dans le buste avec un haut du corps léger, propice à de multiples ondulations délicates des bras. Le spectre naît de cette alchimie chorégraphique qu’un jeune danseur incarnera alors parfaitement : Vaslav Nijinsky !
L’Après-midi d’un faune - Vaslav Nijinsky / Les Ballets russes
En 1912, c’est au danseur Vaslav Nijinsky et au décorateur Léon Bakst que Diaghilev confie une nouvelle création à partir d’un poème de Mallarmé et sur une composition de Debussy. A la manière de Fokine, Nijinsky fait des recherches pour trouver une gestuelle répondant à ce thème antique et mythologique. Il s’inspire notamment de ses visites au Louvre et de l’étude des attitudes des personnages peints sur les vases de l’Antiquité grecque.
Ainsi, il invente une danse où les corps sont en torsion, position non naturelle et très éloignée de l’alignement de la danse classique, ce que nous lisons très clairement dans les corps de Nicolas le Riche et d’Emilie Cosette, incarnant le faune et la Grande nymphe dans cette reprise de l’Opéra de Paris. De plus, il chorégraphie en couloirs, de jardin à cour, mettant en scène un bas-relief vivant. Point de grand saut, mais des marches pieds nus. Pas de lien véritable entre rythme musical et danse : Nijinsky s’appuie sur la ligne mélodique comme pour déployer un paysage antique intemporel…
Le public est déçu et surtout choqué devant la laideur, l’animalité et l’érotisme du faune. Le « scandale Nijinsky » naît!
Le Sacre du Printemps - Vaslav Nijinsky / Les Ballets russes
1913 : c’est un rite païen qui est mis en scène. Celui d’une tribu primitive russe qui sacrifie une vierge au dieu de la nature dans le but d’assurer la renaissance du printemps. Musique et danse n’ont qu’un objectif : exposer le caractère primitif de l’humanité et la puissance de la Terre !
Millicent Hodson, dans ce remontage de 2009, d’après Nijinsky et pour les ballets de Monte Carlo, se soucie de rendre compte des choix de Nijinsky pour répondre au thème : pieds en dedans, ancrage dans le sol, raideur des membres, dos courbé, sternum penché vers le sol…
Dernière danse. Celle de l’élue. Celle de la jeune fille sacrifiée, enfermée dans le cercle rituel de la communauté, est sans concession. Scandale dans le public qui ne comprend ni ce qu’il voit, ni ce qu’il entend et scandale chez les danseurs qui y voient une négation de leur savoir-faire !
Parade - Léonide Massine/ Les Ballets russes
Remonté pour Europa danse en 2008, Parade est l’œuvre de 4 génies de leur temps : Jean Cocteau, Léonide Massine, Pablo Picasso et Erik Satie ! Créé durant la Première Guerre mondiale, ce ballet répond au désir de Diaghilev de changer d’univers esthétique. Jean Cocteau lui propose un univers réaliste : celui d’un théâtre forain avec acrobates, prestidigitateur chinois, petite fille américaine, managers et même un cheval ! Massine développe une gestuelle réaliste dans la lignée des propositions de Picasso. Satie n’est pas en reste et utilise pour la création musicale un certain nombre de bruits de roues de loterie, de claquettes, de machines à écrire ou encore de crécelles et autres coups de révolver. Tout apparaît alors quasi surréaliste et chaque danseur est libéré ou contraint, selon son costume, pour ses propres mouvements. Les managers n’ont que peu de possibilités gestuelles… Le cheval s’organise à deux danseurs… Réalisme côtoie esprit cubiste !
Relâche - Jean Börlin / Les Ballets suédois
2014 : 90 ans après sa création, Petter Jacobsson et Thomas Caley remontent Relâche pour le Ballet de Lorraine remettant ainsi à l’honneur le travail des Ballets suédois et de leur chorégraphe Jean Börlin. Présenté comme un ballet instantanéiste en 2 actes et 1 entracte cinématographique, il est avant tout l’œuvre du plasticien Francis Picabia. Les décors des deux parties jouent avec les mouvements de lumières.
En 1924, pour être sûrs que les spectateurs restent assis durant l'entracte, est diffusé le film Entr'acte de René Clair. Un puzzle de scènes ubuesques : Man Ray et Marcel Duchamp jouant aux échecs, des surimpressions d’images, un enterrement, une danseuse filmée par le dessous, une femme à barbe travestie en Satie…
Pour la danse, le chorégraphe Jean Börlin joue sur différents registres de mouvements : gestes du quotidien, motifs dansés des cabarets, danses de salon et danse classique. Tout paraît décousu, saugrenu, proche d’un esprit dada quoi !…
Approfondir
Les références bibliographiques sur cette période sont très nombreuses. La bibliographie ici proposée résulte de choix pour permettre aux lecteurs d’approfondir ses connaissances, d’accéder à des témoignages iconographiques et d’approcher la parole des artistes et des témoins de leur temps.
Sources
Diaghilev Serge, L’art, la musique et la danse - lettres, écrits, entretiens, coédition CND, Vrin, INHA, hors collection, 2013.
Karsavina Tamara, Ma vie : l’Etoile des Ballets russes raconte (trad. Denyse Clairouin), Bruxelles, Complexe, 2004.
Fokine Michel, Memoirs of a Ballet Master, Boston, Little Brown & Co., 1961.
Les Archives internationales de la danse (1931-1952), Pantin, CND, coll. Recherches, 2006.
Nijinska Bronislava, Mémoires 1891-1914 (trad. Gérard Mannoni), Paris, Ramsay, 1983.
Nijinsky Vaslav, Cahiers, Actes Sud, Babel, 2000 (édition non expurgée).
Ouvrages monographiques
Boulbès Carole, Relâche, dernier coup d'éclat des ballets suédois, Dijon, Ed. Les Presses du réel, 2017.
Huesca Roland, Triomphes et scandales : la Belle Epoque des Ballets russes, Paris, Hermann, 2001.
Pastori Jean-Pierre, 2. La danse : Des Ballets russes à l’avant-garde, Paris, découvertes Gallimard, n°332, 1997 (pour l’édition la plus récente).
Poudru Florence, Dans le sillage des Ballets russes, 1929-1959, Pantin, CND, 2010.
Suquet Annie, L’éveil des modernités (1870-1945), Pantin, CND, 2012.
Catalogues d’exposition
Serge Diaghilev et les Ballets russes. Etonne-moi ! (dir. John E. Bowlt, Zelfira Tregulova, Nathalie Risticher Giordano, catalogue d’exposition, Monaco), Skira, 2009.
1909-1929 : Les Ballets russes à l'opéra (dir. Martine Kahane, catalogue d’exposition, Paris), Bibliothèque nationale, Hazan, 1992.
Les Ballets suédois, une compagnie d’avant-garde (1920-1925), (dir. Mathias Auclair, catalogue d’exposition, Paris), Montreuil, Éditions Gourcuff Gradenigo, 2010.
Open sources
Un grand nombre des programmes des Saisons russes au Théâtre des Champs-Elysées
par les Ballets russes sont visibles sur Gallica.fr.
Diaghilev : les ballets russes, (catalogue d’exposition, Paris), Bibliothèque nationale, [17 mai-29 juillet] 1979 / [catalogue par Nicole Wild et Jean-Michel Nectoux] ; [préface de Georges Le Rider], Bibliothèque nationale, Paris, 1979, mise en ligne le 03/06/2013.
Archives Internationales de la danse (1932-1936) : collection en ligne sur le site du CND, en coopération avec la BnF.
Plus d'information
Auteur
Docteur en Histoire de l’art, Céline Roux est chercheur indépendant. Spécialiste des pratiques performatives du champ chorégraphique français, elle est notamment l’autrice de Danse(s) performative(s) (L’Harmattan, 2007) et de Pratiques performatives / Corps critiques # 1-10 (2007-2016) (L’Harmattan, 2016). Conférencière, formatrice et enseignante, elle intervient dans différents cadres d’enseignement supérieur ainsi que dans la formation des danseurs. Elle collabore aussi aux projets artistiques de danseurs-chorégraphes contemporains que ce soit pour les archives d’artiste, la production de textes critiques et de projets éditoriaux, ou l'accompagnement dramaturgique. Elle a collaboré à plusieurs projets numériques de partage de la culture chorégraphique comme 30ansdanse.fr. Parallèlement à ses activités sur/pour/autour de l’art chorégraphique, elle pratique le hatha yoga en France et en Inde depuis plusieurs années.
Générique
Sélection des extraits
Céline Roux
Textes et sélection de la bibliographie
Céline Roux
Production
Maison de la Danse
Ce Parcours a pu voir le jour grâce au soutien du Secrétariat général du Ministère de la Culture et de la Communication - Service de la Coordination des politiques Culturelles et de l'Innovation (SCPCI)