La belle dame - Francine Lancelot
A l'époque du ballet de cour, ancêtre de la danse classique, le spectacle conjuguant poésie, musique et danse se déroulait au centre de grandes salles bordées sur trois côtés d'un ou plusieurs rangs de galerie dans lesquels venaient s'asseoir les spectateurs. Prenant place sur une estrade, au milieu du parterre, la famille royale découvrait ainsi une succession d'« entrées » ou séquences chorégraphiées Les différentes « entrées » de Belle dame mettent en évidence les figures et combinaisons géométriques que la chorégraphie dessine au sol.
Le lac des cygnes - Marius Petipa
Avec la construction de structures permanentes, sur le modèle de la salle « à l'italienne », la danse glisse de la cour au théâtre et adopte un dispositif scénique frontal. Si le cadre scénique permet davantage de jeux de machinerie, il influe également sur les codes et règles du ballet. L'en-dehors, qui sollicite la rotation externe des fémurs et facilite les déplacements latéraux, l'organisation des mouvements autour du plan axial et le maintien du centre de gravité procèdent de l'incorporation des lois de la perspective. La splendeur d'une chorégraphie d'ensemble tient alors à la manière dont plans, lignes et axes de l'espace se matérialisent dans l'œil du spectateur. Marius Petipa excellait dans ce registre, comme en témoigne cet extrait de l'acte II du Lac des cygnes.
Roaratorio - Merce Cunningham
S'appuyant sur la théorie de la relativité d'Einstein, le chorégraphe américain Merce Cunningham rejette l'idée d'un point de vue unique et du centre comme lieu de convergence du regard. L'espace scénique s'affranchit de toute hiérarchisation et acquiert une autre dimensionnalité, le danseur se meut désormais plus dans un rapport frontal mais peut tourner le dos au public, libre de choisir ce qu'il veut voir. Il peut également. Car, selon Cunningham, « un corps immobile occupe autant d'espace et de temps qu'un corps en mouvement ».
Sanctum et Imago – Alwin Nikolaïs
Tout comme Cunningham, Alwin Nikolaïs fait le choix de la multipolarité. Lumière, décor, costume et chorégraphie œuvrent ensemble. L'exploration des possibilités scénographiques de l'espace entreprise par Nikolaïs s'accompagne d'un travail spécifique sur le corps. Car pour habiter celui de la scène, le danseur se doit d'investir l'espace qui est en lui.
Collection particulière - Maria Donata d'Urso
Collection particulière, de Maria Donata d'Urso opère une autre reconfiguration de l'espace scénique. Celui-ci n'est pas agrandi par un miroir, mais départagé horizontalement en deux volumes, par une épaisse plaque de verre fendue longitudinalement. Insérée entre les deux bords, la danseuse doit organiser avec beaucoup d'agilité ses appuis pour se maintenir en suspension. Ses mouvements d'oscillation entre le dessus et le dessous de cette ligne phospholuminescente découpent le corps selon son axe de symétrie. La chorégraphe développe une réflexion autour du corps, de sa structure et de sa surface.
Défilé - Régine Chopinot
Régine Chopinot réinvente dans cette pièce le show de mode à la sauce burlesque. Contrainte par les dimensions du podium, et sa disposition au milieu des spectateurs, assis sur les trois côtés, comme pour un « vrai défilé », sa chorégraphie s'articule autour d'allers-retours entre face et lointain. Du spectacle, Marc Caro a tiré un clip qui accentue davantage, du fait de la caméra, l'effet de profondeur étroite produit par le dispositif scénique.
Défilé de la Biennale
Inauguré en 1996, le défilé s'inscrit dans la tradition populaire des spectacles de rue. C'est un moment fort de partage, de collaboration, qui contribue à renforcer le lien social.
Desa Kela Patra
A Bali les représentations ont lieu en extérieur, comme ici devant le temple du village de Sebatu. La disposition de l'orchestre de xylophones définit l'espace de la danse. Entourés des musiciens, portés par leurs rythmes, les danseurs interprètent l'un des fleurons de l'art chorégraphique balinais, jadis réservé à la cour des rois et des princes.
Stronger - Wilkie Branson
Les places publiques, les gares, les bois, les cages d'escaliers. Les champs, les chantiers, les musées... Autant de lieux pour des expériences chorégraphiques insolites menées par des chorégraphes contemporains. Dans la vidéodanse Stronger, le sol meuble d'une forêt, parsemé de feuilles et de racines, fournit des appuis instables aux figures de breakdance. Le terrain vallonné, encombré de roches et d'arbres, offre aux deux B. Boys, des supports insolites, de hauteurs et de profondeurs irrégulières amenant la chorégraphie à se mâtiner de glisse et de grimpe.